«

»

Mai 19

Perspectives

Je ne vois donc rien qui nous empêche de revenir un jour à quelques-uns des principes les plus sûrs et les moins douteux de la religion et de la vertu traditionnelles – que l’avarice est un vice, la pratique de l’usure un délit, et l’amour de l’argent détestable, que ce sont ceux qui pensent le moins au lendemain qui progresseront le plus sûrement sur le sentier de la vertu et de la sagesse authentique.

 Nous chérirons à nouveau la fin plutôt que les moyens et préférerons le bien à ce qui est utile. Nous honorerons ceux qui nous apprendront à cueillir chaque heure et chaque jour comme il convient et dans la vertu, ainsi que ces êtres merveilleux qui savent apprécier les choses à leur juste valeur : « les lys des champs, qui ne peinent ni ne filent » (Mathieu 6 : 28).

Mais prenez garde ! Le temps n’en est pas encore venu. Il nous faudra encore pour un siècle ou davantage, nous prétendre à nous-mêmes ainsi qu’aux autres, que le juste est vil et que le vil est juste ; car le vil est utile alors que le juste ne l’est pas. L’avarice, l’usure et la méfiance demeureront nos dieux pour encore un temps. Car eux seuls sont capables de nous faire émerger du tunnel de la nécessité économique, vers la lumière du jour.

John Meynard Keynes :   Perspectives économiques pour nos petits enfants (1930)

Traduction de Paul Jorion  www.pauljorion.com

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *