Des indicateurs fiables et pertinents sur la situation économique, politique et sociale mondiale sont indispensables afin de traverser la crise sans encombre. Mais ceux utilisés par les gouvernements ou les entreprises sont, au mieux, inutiles dans la période actuelle de remodelage profond du monde, au pire, néfastes.
Dans un monde où circulent tant « d’actifs fantômes » ou de créances douteuses, tant de produits dérivés opaques ou sans valeur, la finance est de plus en plus déconnectée de la réalité. Les indicateurs financiers (cours des bourses notamment) doivent donc être interprétés avec la plus grande précaution.
De même, le feuilleton hebdomadaire de « la vie de l’économie » nous maintient en haleine avec tantôt l’annonce des chiffres de la « confiance », du « sentiment », tantôt avec les discours des banques centrales… Mais ce n’est pas à ce rythme qu’évoluent les fondamentaux et la réalité n’a que faire de la méthode Coué consistant à se raccrocher à toutes ces données d’ordre psychologique.
Ces informations de court terme ont davantage pour effet de cacher les maux profonds de l’économie que d’influer vraiment sur la réalité comme elles le prétendent, en particulier dans cette période de grande crise.
Quant aux vraies statistiques, le mode de calcul de ces chiffres ne reflète parfois plus du tout le vrai paysage économique : ainsi en va-t-il, par exemple, des chiffres du chômage et de l’inflation, deux critères pourtant bien ancrés dans la réalité et jouant à juste titre un rôle important. Mais comme le dit l’expression populaire : « À défaut de pouvoir enrayer la fièvre, on a cassé le thermomètre. » Et toute la question est alors de déchiffrer les statistiques pour obtenir une vision plus précise..
Outre les statistiques décrivant l’économie réelle (emploi, consommation, volume de commerce international, consommation d’énergie, etc.) et la part de virtualisation de l’économie (désindustrialisation, endettement), il est également intéressant de considérer la réalité sociale et politique par des indicateurs reflétant la pauvreté, la démographie, les conflits, le blocage politique, etc.
Enfin, certains indicateurs généraux comme le Produit intérieur brut (PIB) ou le cours des monnaies, sont évidemment à suivre, mais en gardant à l’esprit que le premier peut être artificiellement dopé par la part « virtuelle » de l’économie (actifs pourris des banques, par exemple, ou actions des banques centrales), et le second temporairement perturbé par la spéculation, bien que sur le long terme il reflète tout de même bien l’état relatif des économies des différents pays.
En résumé, il s’agit de conserver un œil critique sur les statistiques quotidiennes qui nous sont servies
Il est d’autant plus important de trouver les bons repères et d’éliminer les illusions que nous assistons à un véritable changement de paradigme hors du système mis en place par les États-Unis, ou en d’autres termes à l’effondrement du monde qu’ils ont créé. Depuis quelques décennies, ils tenaient en effet leur rang uniquement parce qu’ils se situaient au-dessus des règles du jeu mondial grâce à la prééminence et au caractère incontournable de leur monnaie : le dollar. La remise en question de cet avantage les contraint à redevenir une puissance comme une autre. Cela nécessite un ajustement considérable que reflètent, par exemple, le déficit commercial abyssal, la désindustrialisation ou l’endettement du pays, avec des conséquences immenses sur leur capacité d’influence et sur le niveau de vie des Américains.
Les pays de l’orbite US, principalement Royaume-Uni et Japon, totalement alignés sur les principes du modèle économique américain et qui profitaient des retombées de la situation privilégiée du patron, souffrent également. L’Europe, proche du modèle économique US, en particulier depuis la chute du Mur de Berlin, mais dont le projet d’intégration avait pour objectif d’accroître l’indépendance vis-à-vis des États-Unis, est en partie entraînée dans le maelström, mais dispose de caractéristiques structurelles qui lui fournissent des outils pour pouvoir s’en dégager.
Cela dit, en 2013, au-delà des puissances occidentales, c’est le monde entier qui va tanguer, jusques et y compris ces nouvelles puissances représentées par les BRICS dans lesquelles des bulles voient le jour, provoquées par l’utilisation des injections d’argent facile de la Fed dans l’économie US, puis mondiale.
Extraits (choisis) du GEAB n° 73
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