A la fin de Candide, Pangloss fait voir pour la millième fois que, tout compte fait, malgré les catastrophes qui frappent l’humanité, tout est pour le mieux en ce monde, qui est le meilleur possible. A quoi Candide répond : Cela est bien dit, mais il faut cultiver notre jardin.
Ce rappel des nécessités moque la providence des philosophes. Car en attendant il faut bien travailler, et prendre soin de la terre ; les récoltes ne se feront pas seules ; et les théories ne nourrissent pas les familles. C’est paresse de s’en remettre au cours providentiel des événements et d’attendre la manne.
La formule de Voltaire évoque aussi, irrésistiblement, l’idée du jardin secret. On devine que ce qui importe est d’abord en nous-mêmes, dans nos sentiments et notre volonté. Que la vraie sagesse est de cultiver son âme, d’en prendre soin, comme disait Socrate. — Mais le mieux est de tenir ensemble les deux sens, afin de se rappeler ce que signifie le mot culture.
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La culture est à l’esprit ce que l’agriculture est à la terre : le développement et l’épanouissement de ce que l’être humain contient en germe. Un esprit qui n’est pas nourri de lectures et de découvertes est comme un terrain vague qui ne produit qu’herbes sauvages. Mais ensemencé, entretenu, instruit, l’esprit engendre des fruits innombrables.
A la condition d’être patient. Il est long le temps qui sépare les semailles de la récolte. Différent en cela la consommation, qui est immédiate, sans délai. La culture est longue à parfaire, et impossible à prévoir dans ses effets. Pour se cultiver, il faut donc se fier à l’avenir.
Par où revient l’idée de providence : ceux qui se seront patiemment ouverts au monde seront récompensés au-delà de toute espérance. Mais encore faut-il cultiver notre jardin.
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