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Oct 02

Cul de sac

 

Les marchés d’actifs financiers montrent que, contrairement au discours lénifiant des gouvernements de la zone euro et de la BCE, le système bancaire continue d’accumuler des pertes en prêtant aux États l’argent qu’elles reçoivent de la BCE.

Pour ne pas révéler la faillite dont il n’est pas sorti depuis l’effondrement systémique des subprimes en 2008, le système bancaire mondial emprunte des liquidités aux banques centrales à des taux d’intérêt arbitrairement bradés.

Depuis la faillite de Lehman Brothers, le marché interbancaire de la monnaie est gelé : personne ne connaît le prix réel raisonnable des actifs financiers que les banques portent dans leur bilan en contrepartie des passifs qu’elles doivent à l’économie réelle et aux citoyens. Les banques centrales jouent donc nominalement leur rôle de garant de la liquidité bancaire : mais au lieu d’exiger des banques qu’elles isolent dans leur bilan des titres de crédit et d’investissement dont le prix réel soit avec certitude au moins égal au prix nominal des liquidités empruntées, les banques centrales admettent en collatéral des titres dont le prix réel n’est pas vérifiable voire explicitement falsifiable.

Concrètement, le Président de la Bundesbank et membre du Conseil de la BCE, voit l’accumulation de titres publics dans les comptes de collatéralisation de la BCE dont le prix réel coté sur le marché financier libre ne correspond pas au total des allocations de crédit central consenties aux banques. Dans le même temps, les titres publics s’accumulent à l’actif des bilans bancaires comptabilisées au prix nominal en vertu de la réglementation officielle et non au prix réel du marché de la liquidité interbancaire.

Par application des normes comptables internationales et des règles de la liquidité monétaire en euro, les actifs bancaires sont surévalués alors que les passifs bancaires sont légalement intangibles au crédit des épargnants et déposants. La finance bancaire est explicitement déconnectée de la réalité juridique et économique. Sous l’angle du droit et de l’économie positive, le mensonge financier est patent. La Bundesbank voit bien que la vérité va surgir : elle voudrait donc que les banques européennes aient plus de fonds propres pour éponger les pertes qui seront inéluctablement révélées sur les titres de dette grecque, portugaise, espagnole, italienne et même française.

En toute rigueur économique et comptable, la Bundesbank dit qu’il faut commencer à envisager que les titres publics portés à l’actif des banques en prix nominal, soient évalués à des prix plus cohérents avec l’économie réelle des États de la zone euro. Cela signifie qu’il faut provisionner davantage de pertes en diminution des capitaux propres bancaires ; donc que de riches créanciers des banques logés dans les paradis fiscaux en deviennent des actionnaires ; donc que le capital des banques soit de vraies primes d’assurance systémique du crédit aux mains d’investisseurs responsables.

En d’autres termes, que le Président de la Bundesbank n’emploie pas pour ne choquer personne, il va falloir que les riches épargnants européens et étrangers qui ont accumulé des créances spéculatives sur l’économie européenne à coup de délocalisation, d’optimisation fiscale et de dumping social légaux grâce au marché et à la monnaie uniques, paient sur leur capital financier les destructions qu’ils ont infligées au capital productif réel de la société européenne.

Extraits d’un article de Pierre Sarton du Jonchay  sur le blog de Paul Jorion        www.pauljorion.com

 

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