Le contre-pied est le suivant.
On est sur un scénario de reprise de l’économie Américaine plus ou moins auto-entretenue. Les Etats -Unis sont censés être la locomotive qui donne traction à la reprise mondiale. Dans cet esprit on attend croissance, hausse des taux, progression du dollar et un peu plus d’inflation dans le système américain. Ce différentiel de croissance contraste avec la situation médiocre de l’Europe, de la Chine et des Emergents ou la menace de déflation persiste et ou les taux et le change sont censés être à la baisse.
Mercredi 29 Avril, le scénario a subi une secousse avec la publication d’une croissance quasi nulle au premier trimestre aux US et des indicateurs meilleurs en revanche en Europe. Du coup le scénario financier fondé sur la désynchronisation et le différentiel américain s’est trouvé contesté : Il s’en est suivi, une forte baisse du dollar, une forte hausse sur l’euro, une chute spectaculaire du cours de Bunds Allemands, une panique de ventes sur les Bourses européennes.
A noter qu’en même temps les indicateurs publiés au Japon sont mauvais et qu’ils témoignent du peu de résultat de la politique aventuriste de Abe. En Chine on tente tant bien que mal de faire face au ralentissement et au surendettement par des mesures monétaires sélectives, mais on parle d’éventuels recours au Quantitative Easing et à la baisse du Yuan. Tout ceci pour signifier que l’on est d’abord dans le contre-pied et ensuite dans l’instabilité.
La question de la situation réelle de l’économie américaine n’est pas tranchée : les statistiques sont médiocres, mais leur qualité est pourrie. La quasi-stagnation du premier trimestre (+0,2% en annualisé) devient une récession si on prend comme critère les ventes domestiques finales nominales (en repli) et au contraire une expansion si on prend l’indicateur des recettes fiscales mensuelles (en progrès de 4,6%).
Tout se passe comme si on était simultanément dans une récession de la demande finale et une expansion du GDP. A noter cependant que le GDP hors incidence des stocks est en recul lui aussi. Tout ceci suggère que les instruments statistiques sont dépassés, ils ne collent plus à la réalité ou que les mesures exceptionnelles distordent les économies et que l’on ne sait plus très bien ce que l’on mesure et quel est le sous-jacent.
Nous pensons que les deux interprétations se conjuguent, le réel est distordu et les outils de mesure sont inadaptés. Et cela devient évident quand on flirte avec la récession ou la faible expansion. On est dans l’erratique, mais le fait que l’on soit dans l’erratique indique que l’activité est médiocre et la croissance douteuse.
L’inconnue ou l’incertitude sur la situation américaine sont importants pour les raisons suivantes.
-la politique de la Fed sera « data dépendant », mais on ne sait pas interpréter les datas !
-la propagande cherche à tromper et à faire croire à des effets météo ou exceptionnels
-l’incidence d’une hausse ou non-hausse des taux peut -être forte, disproportionnée.
-la traction de l’économie US est déterminante pour les partenaires mondiaux
-la question de la confiance et de la crédibilité des politiques monétaires non conventionnelles est à nouveau posée.
Non seulement au niveau américain, ce qui est grave, mais également au niveau européen puisque l’on est entré dans un QE sur la base des résultats supposés obtenus aux USA.
Il ne faut pas oublier que pour des résultats très modestes, le bilan de la Banque Centrale américaine a progressé de 450% depuis Mars 2009. Pendant ce temps, la Bourse a progressé au niveau de S&P de 165%, le GDP de 13% et les salaires horaires réels de …1%.
Un seul chiffre, un seul trimestre repose toute la question de la politique de long terme suivie par les responsables américains, c’est pour cela que le risque est colossal, nous sommes dans une situation de tout ou rien.
Extraits d’un article de Bruno Bertez brunobertez.com
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