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Déc 10

Nation

Une nation est une âme, un principe spirituel.

Deux choses qui, à vrai dire, n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis.

La Nation, comme l’individu, est l’aboutissant d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements. Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime ; les ancêtres nous ont faits ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritable), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale.

Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple.

Une nation est donc une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu’on a faits et de ceux qu’on est disposé à faire encore. L’homme n’est esclave ni de sa race, ni de sa langue, ni de sa religion, ni du cours des fleuves, ni de la direction des chaînes de montagnes.

Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de cœur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation. Tant que cette conscience morale prouve sa force par les sacrifices qu’exige l’abdication de l’individu au profit d’une communauté, elle est légitime, elle a le droit d’exister.

 « Consentement », « volonté » , voici des mots acceptables pour le lecteur libéral qui tendraient même à réconcilier la vision du nationalisme de Renan avec nos propres intuitions. Certains argumenteront surement qu’il est aussi question d’une « abdication de l’individu », cette même notion de l’individu que Barres qualifiait de « moi individuel ». Ainsi, pour Barres, nous perdrions tous un » moi individuel » au profit d’un moi collectif. Certes, mais par choix. Une donnée du libre arbitre.

Après tout, l’homme nait seul et meurt seul mais doit-il vraiment vivre seul tout le long du parcours pour faire preuve d’un véritable esprit libéral combatif luttant contre toute perte d’individualité ?

Extraits d’un article d’Emmanuelle Gave   sur le blogalupus

 

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