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Mar 17

Barbarie

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Le second type de barbarie, de plus en plus hégémonique dans la civilisation contemporaine, est celui du calcul et du chiffre.

Non seulement tout est calcul et chiffre (profit, bénéfices, PIB, croissance, chômage, sondages…), non seulement même les volets humains de la société sont calcul et chiffre, mais désormais tout ce qui est économie est circonscrit au calcul et au chiffre.

 Au point que tous les maux de la société semblent avoir pour origine l’économique. Cette vision unilatérale et réductrice favorise la tyrannie du profit, de la spéculation internationale, de la concurrence sauvage.

 Au nom de la compétitivité, tous les coups sont permis et même encouragés ou exigés, jusqu’à instaurer des organisations du travail déshumanisantes comme en atteste le phénomène exponentiel de burn out.

Déshumanisantes mais aussi contre efficientes à l’heure où la pérennité des entreprises est davantage conditionnée à la qualité de l’immatériel (coopération, prise d’initiatives, sens de la responsabilité, créativité, hybridation des services et des métiers, intégration, management etc.) qu’à la quantité du matériel (ratios financiers, fonds propres, cours de bourse, etc.).

Ainsi la compétitivité est sa propre ennemie. Cette situation est liée au refus d’aborder les réalités du monde, de la société, et de l’individu dans leurs complexités.

La connaissance est aveugle quand elle est réduite à sa seule dimension quantitative, et quand l’économie comme l’entreprise sont envisagées dans une appréhension compartimentée.

Or les cloisonnements imperméables les uns aux autres se sont imposés.

La logique dominante étant utilitariste et court-termiste, on ne se ressource plus dans l’exploration de domaines, d’activités, de spécialités, de manières de penser autres que les siens, parce qu’a priori ils ne servent pas directement et immédiatement l’accomplissement de nos tâches alors qu’ils pourraient l’enrichir.

La culture n’est pas un luxe, elle nous permet de contextualiser au-delà du sillon qui devient ornière. L’obligation d’être ultraperformant techniquement dans sa discipline a pour effet le repli sur cette discipline, la paupérisation des connaissances, et une inculture grandissante.

On croit que la seule connaissance “valable” est celle de sa discipline, on pense que la notion de complexité, synonyme d’interactions et de rétroactions, n’est que bavardage.

Refuser les lucidités de la complexité, c’est s’exposer à la cécité face à la réalité.

Extraits d’un article de E.Morin

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